Jumping the Broom : Quand les Noirs Américains N’avaient pas le Droit de se Marier

In this film publicity image released by Sony Pictures, Laz Alonso, center left, and Paula Patton are shown in a scene from "Jumping the Broom." (AP Photo/Sony-TriStar Pictures, Jonathan Wenk)

Tu as sûrement en tête une scène de film où de jeunes mariés afro-américains, main dans la main, sous les encouragements de leurs proches, sautent ensemble par-dessus un balai posé au sol ?

Cette charmante coutume est en fait une façon pour les époux d’honorer la mémoire de leurs ancêtres, pour qui le droit de se marier a fait l’objet d’une lutte, au même titre que tous les autres droits civiques dont ils étaient privés.

Privés du droit de se marier

Un foyer est une petite société à lui tout seul. Les époux s’y soutiennent inconditionnellement, y fondent une famille, éduquent leurs enfants selon leurs propres valeurs, y transmettent la fierté de leurs ancêtres. Autrement dit, un foyer est un lieu de résistance à l’oppression et d’indépendance face au monde. Comment un esclavagiste aurait-il pu tolérer cela ?

L’esclavage reposait sur des humiliations qui dépossédaient l’individu de son identité, de son nom, de ses racines, et de ses biens. La privation du droit de se marier faisait partie de ce système.

Le mariage, en plus d’être un acte d’amour, était donc aussi un acte de résistance, qui proclamait qu’on appartenait à la personne que l’on aimait, et non à un maître.

Les esclaves qui souhaitaient se marier malgré tout devaient donc le faire sans attendre de reconnaissance légale de leur union, et s’étaient inventé un rituel qui marquait ce grand moment.

Ils plaçaient un balai au sol lors de leurs noces, et pour sceller leur union, sautaient ensemble par-dessus ce balai.

Pourquoi un balai ? Cet objet est plein de symboles :

  • Le balai est un objet central dans les rituels du quotidien d’un foyer. Il représente donc ce foyer que les jeunes mariés souhaitent fonder.
  • Symboliquement, le balai permettait de chasser les énergies négatives autour du jeune couple, et de lui porter bonheur pour sa vie future.
  • Il marquait comme une ligne entre le passé des deux individus et le futur du couple. Toux deux sautaient à pieds joints dans leur nouvelle vie, comme s’ils étaient deux nouvelles personnes.

 

Ce magnifique symbole a traversé le temps et il est encore présent lors des mariages des Afro-Américains de nos jours, comme un hommage aux ancêtres autant que comme un symbole d’entrée dans une nouvelle vie à deux. L’expression jumping the broom (sauter par-dessus le balai) est à elle seule une autre manière de dire « se marier ».

Le balai est de nos jours orné de fleurs, de rubans, de coquillages, le tout dans le code couleur du mariage célébré. On a toutes envie d’ajouter cette coutume à nos rêves de robe blanche !

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Le droit d’aimer, quelle que soit notre couleur

Le XIIIe amendement de la constitution des États-Unis mit fin à l’esclavage, puis le XIVe amendement proclama l’égalité de tous les citoyens, quelle que soit leur couleur de peau. Mais dans les faits, les lois et les pratiques dans les différents états restreignaient les droits des noirs, d’où la longue lutte pour les droits civiques qui a marqué l’histoire américaine du XXe siècle.

Parmi ces droits, celui mariage était enfin acquis… avec une restriction, dans plusieurs états du pays : l’interdiction de se marier entre noirs et blancs.

C’est alors qu’un couple, en 1967, en luttant pour ses propres droits, a acquis une liberté de plus pour tous les Américains : celle d’épouser la personne que l’on aime, quelle que soit sa couleur de peau.

Voici l’histoire de ce #Coupledinfluence :

Elle s’appelle Mildred Jeter, elle est noire, elle a 18 ans, et lui Richard Loving, il est blanc, ils a 25 ans et tous deux s’aiment depuis l’enfance. Ils vivent en Virginie où la loi interdit les mariages interraciaux, mais leur amour n’entend pas admettre cette injustice. Ils se marient donc en juin 1958 dans le district voisin de Columbia. Mais à leur retour en Virginie, ils sont arrêtés chez eux au milieu de la nuit, dans leur lit conjugal, par le shérif du comté agissant sur une dénonciation anonyme. Accusés de violation de l’interdiction, ils plaident coupables, et sont condamnés à un an de prison, avec suspension de la sentence pour vingt-cinq ans à condition qu’ils quittent l’État de Virginie.

Pour le jeune couple, déménager était se couper de leur famille, et élever leurs enfants loin de tous ceux qu’ils aimaient. Mais ils n’ont pas le choix : les Loving partent vivre à Washington.

Ni Mildred ni son mari n’étaient des militants. Mais la jeune femme, lassée de cette vie qui déshonore son mariage, fait grandir ses enfants dans un univers qu’elle n’a pas choisi, et la tient loin de sa famille, prend un jour son courage à deux mains. Cette jeune mère au foyer écrit au ministre de la Justice fédérale, un certain Robert Kennedy, par ailleurs le frère du président des États-Unis. Ses services lui donnent le nom d’un jeune avocat originaire de Brooklyn, bénévole à ses heures perdues : Bernard Cohen. Dans sa lettre, Mildred revendique simplement le droit rendre visite à sa famille sans risquer la prison. Elle termine ainsi : « Nous avons trois enfants et nous n’avons pas les moyens de nous payer un avocat. S’il vous plaît, aidez-nous si vous le pouvez. M. + Mme Loving. »

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Le jeune avocat croit en sa cause et entame une série de procès pour faire casser leur condamnation en s’appuyant sur le XIVe amendement de la constitution; l’affaire remonta jusqu’à la Cour suprême, qui cassa le verdict dans une décision unanime des neuf juges, donnant lieu à la loi aujourd’hui appelée « Loving v. Virginia » c’est-à-dire « Loving contre l’État de Virginie ». Depuis, aucune restriction fondée sur l’origine ethnique ne peut entraver la liberté de se marier.

Richard et Mildred Loving retournèrent en Virginie après la décision de la Cour Suprême. Malheureusement Richard perdit la vie en 1975, à l’âge de 42 ans, dans un accident de voiture provoqué par une personne ivre, sa femme étant grièvement blessée.

Le 12 juin 2007, pour les quarante ans de l’arrêt de la Cour Suprême qui lui avait permis d’être officiellement l’épouse de l’homme de sa vie, Mildred fit une déclaration publique:

« Entourée comme je le suis par de merveilleux enfants et petits-enfants, pas un jour ne passe sans que je pense à Richard et à notre amour, notre droit de nous marier, et combien cela signifiait pour moi d’avoir la liberté d’épouser la personne précieuse pour moi, même si d’autres pensaient qu’il était le « mauvais genre de personne » pour m’épouser. Je crois que tous les Américains, quels que soient leur race, leur sexe, leur orientation sexuelle, doivent avoir la même liberté de mariage. […] Je ne suis toujours pas versée dans la politique, mais je suis fière que notre nom à Richard et à moi soit celui d’un arrêt de la Cour qui puisse favoriser l’amour, l’engagement, l’équité et la famille, ce que tant de personnes, noires ou blanches, jeunes ou vieilles, homo ou hétéros, recherchent dans la vie. Je suis pour la liberté de se marier pour tous. C’est de ça qu’il s’agit dans Loving (l’arrêt) et dans loving(l’amour). »

Cette véritable Femme d’Influence nous a quittés en mai 2008 à l’âge de 69 ans.

En 2016, Jeff Nichols adapte cette magnifique histoire dans un film bouleversant, Loving.
Tous les ans, 12 juin, on célèbre la victoire du couple Loving lors d’une manifestation à Manhattan suivie d’une fête près de l’East River : on l’appelle le Loving Day.


Pour voir le film Loving en VOD, clique ici

 

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